vendredi 28 août 2009

Appel à communications : Colloque « La lettre au cinéma », Université d'Artois, les 9 et 10 novembre 2010

Equipe d’accueil « Textes & Cultures »

Colloque « La lettre au cinéma »

Après le succès des colloques « La ville au cinéma » (2004), « L’enfant au cinéma » (2006), « Le son au cinéma » (2008), l’Equipe d’Accueil « Textes et Cultures » organise un nouveau rassemblement scientifique autour de « La lettre au cinéma », les 9 et 10 novembre 2010.
Le terme de « lettre » est à prendre dans sa plus grande richesse polysémique : comme élément du signifié, il peut s’agir des lettres écrites et lues dans tant de narrations filmiques, simples billets rédigés à la main, à la machine, à l’ordinateur... C’est ainsi que l’entend l’ouvrage récent, Lettres de cinéma : de la missive au film-lettre (dir. Nicole Cloarec, 2007) : « L’écriture épistolaire articule en
effet une mise en scène de soi (accès à la subjectivité des personnages) et un pouvoir performatif des messages (lettres de dénonciation, de déclaration ou de rupture) qui en fait un agent dramatique remarquable » (p. 13). On entendra donc le terme dans cette acception traditionnelle, en pensant également aux journaux intimes, aux signatures, ou à la présence d’un caractère qui résume à lui seul une symbolique infamante (La Lettre écarlate, Victor Sjöström, 1926), ou encore aux tatouages sur la peau (The Pillow Book, Peter Greenaway, 1996).
L’inscription naturelle de la lettre dans l’image-mouvement (et par extension du chiffre et autre signe), déclinée à travers de multiples stratégies figurales, à travers diverses ruses et stratagèmes narratifs qui dépassent la convention des cartons et intertitres, fut une des caractéristiques du cinéma muet, très explorée par les avant-gardes françaises, le mouvement Dada, l’expressionnisme allemand, l’avant-garde russe, etc. : que l’on songe aux disques de Marcel Duchamp lequel, dans son film de 1925 Anémic cinéma, met en rotation diverses propositions dont diverses contrepèteries, inventant de véritables calligrammes mouvementés ; ou encore au film de 1924 Le Ballet mécanique de Fernand Léger et de Dudley Murphy, lors de la séquence d’animation du chiffre 0 préludant au mouvement de la phrase « on a volé un collier de perles de 5 000 000 ! »
Quant aux expérimentations de signes graphiques sur pellicule, avec ou sans caméra, de Len Lye et de McLaren, elles concernent aussi bien la période du muet que celle du parlant. Toutes ces réalisations cinématographiques, toutes ces rencontres plastiques et poétiques, témoignent de cette volonté artistique de diriger notre regard vers l’horizon d’un tout-un où lettre et image puissent – sinon coïncider – en tout cas épaissir la matière figurale dans l’invention de nouvelles formes. Dans son film de 1924 L’Inhumaine, Marcel l’Herbier, reprenant une solution du Caligari de Robert Wiene (1919), incruste dans le décor, au dessus de leurs têtes, les pensées intérieures des personnages ; mais l’agencement le plus fameux se trouve probablement dans L’Aurore (1927) de Murnau lorsque la lettre, disparaissant dans un mouvement de liquéfaction, contribue à l’idée de la noyade criminelle.
On trouvera aussi hommages et filiations classiques du côté des génériques : ainsi les lettres tremblotantes qui s’évanouissent dans le générique de Sleepy Hollow (Tim Burton, 1999) font bien écho à celles qui disparaissent, dans le tout premier carton du générique de Vampyr de Carl T. Dreyer (1932). Certes, le délicat problème des sous-titres (VOST) pourra être évoqué. On achèvera ce préambule incitatif, qui vise à ouvrir quelques pistes de réflexion, par le souvenir du film Casablanca (Michaël Curtiz, 1942), où la pluie détrempe, à peine lus par Rick (Humphrey Bogart), les mots de la bien-aimée. Voici qui nous ramène au début de cette présentation.
Nul doute qu’une fois de plus, les participants au quatrième colloque international de l’Université d’Artois consacré au 7e art analyseront des solutions filmiques empruntées à la modernité de diverses décennies et à des cinématographies issues de tous les continents.

Le comité scientifique : Eléonore Hamaide, Françoise Heitz, Patrick Louguet et Patrick Vienne

Les propositions de communications sont à envoyer à :
jmfheitz@numericable.fr ou viennep@club-internet.fr
pour le 30 août 2009.

lundi 3 août 2009

Colloque : La violence du quotidien dans le théâtre et le cinéma contemporains, 27-28 janvier 2011, Université Paul Valéry - Montpellier III

La violence du quotidien

La violence du quotidien dans le théâtre et le cinéma contemporains
Colloque, 27-28 janvier 2011



Ce colloque, prévu pour janvier 2011 et qui devrait s’étendre sur deux journées, s’inscrira dans la continuité des précédents travaux du champ « Littérature, discours critique, discours social » du RIRRA 21 (Université Paul-Valéry-Montpellier III) portant sur les liens entre littérature et société, littérature et histoire des idées et des mentalités : colloques « L’Empreinte du social dans le roman contemporain » en 2004, « Le théâtre du couple au XXe siècle » en 2006 , « Le Proche », à partir des essais du sociologue Simmel, en 2008. Celui-ci est consacré essentiellement au théâtre (dans une moindre mesure au cinéma) des vingt dernières années et n’exclut aucune aire géographique.

La violence fait partie de l’art, elle traverse la production théâtrale depuis ses origines. Il suffit de relire les tragédies grecques, Shakespeare, pour comprendre que la violence est la question centrale posée par le théâtre. Mais elle est sujette à des mutations thématiques et esthétiques qui font évoluer sa nature d’une époque à une autre.
Aujourd’hui on fait le constat d’une apparition de plus en plus fréquente de la violence sur la scène contemporaine et ce dans toutes les cultures (scatologie, pornographie, cruauté et obscénité langagière). Quelles sont les raisons de cet engouement que certains jugent malsain ? Est-ce tout simplement le produit d’une société elle-même violente contre laquelle les dramaturges et les spectateurs veulent réagir ? Est-ce le signe d’une crise du théâtre, à une époque où il s’interroge sur son devenir, sa nature et ses modalités? S’agit-il d’une volonté de concurrencer le cinéma, dans une société où l’on n’a plus peur des images, où les medias modifient en profondeur notre regard sur le monde ? Par rapport au cinéma, à quelles difficultés particulières se heurte le théâtre lorsqu’il a à montrer des actes violents ? Notre conception de l’homme et de ses rapports avec ses semblables au sein de la société est-elle en train de changer ?

En réaction peut-être avec les journaux télévisés qui, malgré le flot d’images dont ils assaillent le téléspectateur, rendent toujours plus irréels, lointains et abstraits les conflits et problèmes de société dont ils traitent, le théâtre contemporain recherche la proximité : en même temps qu’il prête une attention plus grande à la situation de l’individu inscrit dans le devenir collectif en mettant en écho les névroses individuelles et les névroses collectives, ce théâtre nous fait pénétrer dans l’intime et nous confronte à la violence du proche, du quotidien, à la bestialité des relations privées. Comme l’avait montré les communications présentées au colloque de 2006 sur le théâtre du couple, les relations interpersonnelles sur lesquelles se structure socialement le groupe humain sont, dans ce théâtre, dévalorisées, les relations amoureuses et familiales en particulier, minées par l’egocentrisme et le désir cannibalique de faire disparaître l’Autre. La cellule familiale y est décrite comme un espace structuré en fonction du plus fort et verrouillé par l’ensemble culturel dans lequel il s’inscrit. Nous souhaiterions revenir sur ces conflits soi/couple/société en creusant la question de la violence.

On examinera donc avec un intérêt particulier la tendance du théâtre contemporain à aborder la violence de notre époque par un examen implacable des relations intimes, du désastre de la famille (voir actuellement au Théâtre du Rond-Point la mise en scène de la pièce de Petter S. Rosenlund « Un garçon impossible » par Jean-Michel Ribes, dans laquelle un garçon de huit ans tue au couteau son médecin, sa mère et son grand-père). Les poussées de violence contre des êtres proches, les aveux de haine entre membres d’une même famille sont monnaie courante. La promiscuité creuse des distances infinies. Le familier s’articule au monstrueux et à l’étrange avec une violence jusqu’alors inédite. Dans le même temps il est tentant de relier ce monstrueux huis-clos domestique à la sphère publique. Quels sont, dans ces pièces, les liens entre violence criminelle (notamment envers des proches) et violence sociale. Une lecture politique de celles-ci est-elle encore possible et laquelle ? La distanciation brechtienne intervient-elle encore dans le travail théâtral ? On réfléchira à des filiations possibles : avec le drame moderne du tournant du XXe siècle et en particulier le théâtre de Strindberg qui déjà soulignait « la barbarie de notre vie intime » , ou avec le théâtre du quotidien qui consacra, au milieu des années 70, le retour en force de l’intime et du domestique souvent perçu à travers le prisme du fait divers .

Les communications présentées aborderont donc cette barbarie qui se présente sous les traits de gens ordinaires, dans des œuvres dramatiques ou cinématographiques qui proposent au public une plongée dans un enfer qui lui est étranger, mais proche cependant , aux frontières de l’humain et de l’inhumain.
Si dans un premier temps on pourra se demander comment l’écriture théâtrale contemporaine aborde de façon spécifique la question de la violence (par exemple refus de toute position idéologique, dans la lignée postmoderne.), on verra ensuite que la représentation de la violence au théâtre pose des problèmes d’ordre dramaturgique et scénographique. Comment représenter la barbarie ? Comment montrer des actes obscènes ? (viols, masturbation, meurtres, actes de torture, etc…). Des comédiens auront à les exécuter sur scène devant un public. Si ce n’est pas un problème au cinéma, cela le devient au théâtre : la représentation théâtrale, comme production en temps réel, et en chair et en os, met face à face des acteurs et un groupe de spectateurs institués dès lors en voyeurs.
Donc qu’en est-il du spectateur ? Pour lui, plus de protection, plus de distance : il est directement pris à parti par ce à quoi il assiste, d’autant plus si les situations présentées sur scène évoquent en partie son quotidien. Quels sont les effets de la représentation de la violence ? Qu’acceptons-nous ou pas d’entendre, nous spectateurs ? Sommes-nous voyeurs, passifs ou dans une démarche critique et réflexive ? Dans l’Epreuve du feu de Magnus Dahlström, qui rassemble une série de confessions de meurtriers, l’un d’eux raconte qu’il laisse sa femme enceinte tomber dans l’escalier sans intervenir. Le metteur en scène François Berreur, à propos de cette situation, disait lors d’une table-ronde : « Le monologue le plus violent est celui où le personnage ne fait rien. L’acte le plus violent ramène à notre statut de spectateur. La plus grande violence est l’absence de violence. Le plus violent est la description du monde dont on est spectateur ». Le spectateur peut avoir le sentiment d’être piégé, voire violenté par cette description du monde dont il est spectateur, surtout s’il s’agit de l’exposition d’une parole qui est habituellement de l’ordre d’une expérience intime. C’est cette exposition qui peut sembler malsaine. De façon générale d’ailleurs, le clivage privé/public tend à s’amenuiser dans les arts contemporains, comme dans la société : reality shows à la télévision, body art de Vito Acconci, et Gina Pane, opérations performances d’Orlan…Les notions d’hyperréalisme, de théâtre-réalité peuvent-elles rendre compte de cette tendance majeure du théâtre contemporain à « servir comme sur un plateau l’exposition froide des pulsions des protagonistes » . La catharsis est-elle encore possible et de quelle catharsis s’agit-il ?
Le spectateur qui place le théâtre (ou d’autres formes d’art) en gardien de sa bonne conscience est mis sur la sellette, conduit à l’auto-critique. La séduction perverse de ces objets théâtraux limite reflète souvent une réflexion sur la représentation. Le théâtre en se confrontant aux limites de l’expérience humaine se pose aussi la question des limites de l’art dramatique : c’est une nouvelle approche de la notion de « représentation » (c’est-à-dire la mise en scène de quelque chose qui n’est pas du réel mais se situe sur « une autre scène ») qui se profile. Pourquoi va-t-on au théâtre ? Acteurs ou spectateurs, qu’allons-nous y chercher ? Qu’est-ce qui nous lie les uns aux autres ?

Les propositions de communication comporteront un titre, un résumé de 300 à 500 mots et une brève notice biographique. Elles seront envoyées avant le 30 avril 2010 par courriel à Florence Thérond, Maître de conférences de littérature générale et comparée à l’Université Montpellier III et organisatrice du colloque (therond.florence@wanadoo.fr )